jeudi 3 novembre 2011

Ici et là, pensées vagabondes


Le rythme s’accélère à 100% RO. Les tenues arrivent au compte-goutte des quatre coins du pays. Il faut ajuster le budget, prévoir tous les détails du défilé, recruter les derniers modèles. Je rame pour finir les descriptions des tenues afin que Svetlana puisse les traduire. C’est le coup de chauffe.

Je m’accorde une pause dehors pour déjeuner. Ici et là est un restaurant français à deux pas de l’ambassade. Ambiance néo-baroque, tendance moderne, décor cosy, grande baie vitrée donnant sur la Piata Romana, couleur jaune vif des taxis, vieux immeubles évoquant Paris, surplombés de constructions en béton sans âme et sans charme, à la mode bucarestoise.

Ici foie gras et tartare de bœuf sont les ambassadeurs de la France. Cuisine de qualité, plats classiques. Un verre de vin. Là je continue de travailler, l’œil buissonnier sur les passants. Une mamie avec son sac de courses, ses grosses lunettes et son chapeau de laine rouge examine le menu depuis le trottoir. Elle me plaît. J’aimerais connaître son destin, comment elle est arrivée là  et ce qu’elle pense de la vie d’aujourd’hui. La crise qui n’en finit pas, son pays en pleine mutation, en perpétuelle construction. Des jeunes femmes au corps de liane et aux grands sacs de cuir déambulent dans la rue, serrées dans leurs doudounes fourrées et leurs jeans slim. Une broche bleue sur un manteau de laine attire mon regard. Des cheveux blancs sous des chapeaux de feutre, clope au bec, les rides grises comme le ciel, les papis roumains. Le sac d’ordinateur en bandoulière, le costume sombre, le téléphone à l’oreille, le visage sérieux de ceux qui n’ont pas que ça à faire, les hommes d’affaires passent d’un pas rapide et assuré.

Retour d’une semaine turque, j’ai du mal à me remettre au roumain. Un signe de main pour demander l’addition, je finis mon café et je vais retrouver Mathilda, Lena, etcetera.

Je resterais bien là, à écrire sur le temps qui passe et les gens en mouvement, sur les conversations d’à côté, les différences capillaires, les regards furtifs, les mots qui s’échangent dans toutes les langues et qui viennent s’entrechoquer dans ma tête. Ici Bucarest, capitale de ma vie pour les trois prochaines années.

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