Ben bien sûr j'ai bu trop de raki. Mais comment vous décrire l'ambiance dans ce restaurant ce soir ? Quatre musiciens un peu taciturnes jouent une musique rythmée à la turque qui entraîne toute la salle. Derrière nous une autre table de femmes chante les chansons en dansant assises. Les épaules bougent. Les mains frappent en rythme. Les sourires illuminent les visages.
Bientôt les gens vont se lever et danser. C'est inévitable. Nous sommes en Turquie ! Même moi qui ne suis pas turque je sens la musique qui me prend, mes muscles, mon corps, qui ont envie de bouger. Et puis les gens sont beaux. Ils ont le sourire, ils chantent, ils se laissent porter par la musique. Et moi je me sens comme eux. Bien que si loin, étrangère à cette culture.
J'ai envie de prendre un crayon et de dessiner leurs portraits. Mais j'ai peur de les rater. Alors je les écris. En espérant que les mots et le raki ne me trahissent pas. Que je saurais raconter cette chaleur, ce rythme qui fait vibrer mon cœur. Et toutes ces voix qui s'élèvent en cœur accompagnent mon écriture. Qui ne va définitivement pas assez vite pour exprimer tout ce que je ressens. Allah ! (C'est la musique) La soirée est délicieuse. Pour rien au monde je ne voudrais être ailleurs.
Et les femmes commencent à se lever. Les épaules tremblent. Mon stylo court sur la serviette en papier qui reçoit ce soir toutes mes pensées. Il y a le joueur de violon qui a dévisagé toutes les femmes de la soirée. Le chanteur avec sa voix envoutante. Le mari de Tuglay qui vient chanter. Les musiciens sont heureux de l'accompagner. Tuglay vibre avec lui.
Et mon stylo noircit ce papier. Le serveur guette son stylo mais je le garde. Je ne peux pas prendre de photo, pas de crayon pour dessiner alors j'écris. Et les hommes chantent. Les femmes, fossettes relevées par le sourire, chantonnent avec eux. Les battements de mains nous entraînent. A côté de moi, Sevgi aussi chante. Et les voix nous emportent.
Ensuite nous cherchons un endroit où danser. Je me sens partir comme dix ans auparavant dans les basses de la musique. Mais c'est l'heure de partir. Derniers délires dans le taxi. Demain les enfants nous attendent. Il faut dormir. Nous n'avons plus vingt ans.
Joyeux anniversaire Caro, Tess et Yasmin !
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