jeudi 14 mars 2013

Artisans roumains

Les artisans roumains, s’ils sont fiers de leur travail, n’en restent pas moins généralement très humbles. Aux quatre coins du pays, dans leurs modestes ateliers, ils continuent de réaliser selon des méthodes ancestrales des objets à la force brute, au détail précis.








Les cheveux blancs qui dépassent du clop (petit chapeau de paille rond) légèrement basculé sur l’arrière de la tête,  l’homme aux mains larges et à la peau nervurée comme un beau morceau de bois sculpte les portails monumentaux qui font la renommée du Maramures. Il vous reçoit sur le perron de son atelier dans lequel s’entassent les copeaux de bois.  C’est là qu’il travaille parfois, assis sur les marches, dans le soleil couchant de l’automne.




Le tailleur de pierre, lui, ne travaille qu’à la belle saison. La silice contenue dans la pierre blanche qui ornera ensuite églises, monastères et cimetières ne lui permet pas de travailler à l’intérieur. Armé de ses burins et marteaux, il sculpte et grave le grès dont les blocs de différentes tailles sont stockés sur le terrain derrière sa maison.






Dans sa petite bicoque rose à l’ombre d’un vieux pommier généreux, au fond de sa cour verdoyante, le tailleur entasse les peaux de mouton, de renard et de belette que lui fournit son ami, le tanneur du village voisin. Dans un coin, la vieille machine Singer à pédale lui tient compagnie. Elle ne lui sert pourtant jamais. Il cout entièrement à la main ces grosses vestes traditionnelles roumaines en mouton retourné ornées de broderies et rehaussées d’astrakan. Il a un regard bleu aussi acéré que son aiguille, aussi doux que le mouvement de ses mains qui touchent délicatement les peaux.





Le maréchal ferrant, lui, met de la force dans ses gestes. Il tape violemment avec son marteau le fer rouge sur l’enclume pour lui donner la forme voulue. Son père est venu voir le travail. Deux mêmes ventres ronds, deux mêmes pantalons bleus et chemises à carreaux, deux barbes hirsutes, l’une blanche, l’autre brune. Le travail physique noue la complicité des hommes. Dehors, le cheval attend ses nouveaux fers, habillé de ses seuls pompons rouges porte-bonheur.




Le rouge est aussi la couleur de la terre de Roumanie cuite dans de vieux fours à bois. Alors que le tour est lancé par le mouvement de son pied, les mains du potier volent autour de la terre qui prend forme, esthétique de l’estèque, délicatesse du geste.




Les artisans roumains sont une certaine âme de la Roumanie, entre histoires et saveurs, gardiens de traditions séculaires à travers leurs larges mains calleuses, leurs douces rides et la maîtrise de leur art.


Article écrit pour le journal de l'afb du mois de mars. Artisans de Bucovine et du Maramures rencontrés cet automne avec Antonia.

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